Vous avez l’impression d’être poursuivi par des publicités sur le web ? Vous surfez sur des sites marchands, d’annonces immobilières, vous cherchez une location pour vos futures vacances… Quelle surprise de voir l’annonce consultée sous forme d’encart publicitaire sur un autre site visité ! Si vous voulez voir un clip vidéo, un tutoriel, vous devez tout d’abord visionner la publicité qui le précède… Votre ordinateur se met à parler tout seul, c’est peut-être une publicité dont le son démarre tout seul automatiquement…
Bref, la publicité est omniprésente sur le web et selon leurs types elles sont plus ou moins envahissantes et gênantes.
La première publicité sur le net sous forme de bannière a été affichée en 1994. Cette publicité en ligne qui n’a eu de cesse de croître a permis au web d’être ce qu’il est actuellement: une intarissable source de contenus. Plus de 20 ans après qu’en est-il de ce système économique ? S’est-il transformé ? Que propose-t-il de nouveau ?
Différents types de publicité
Les bannières publicitaires classiques (ou display)
Elles ne génèrent presque plus de clics. Les publicités à foison situées à côté du contenu consulté par l’internaute ne sont plus vues. Les pop-up, les vidéos, les « pre-roll » qui sont diffusés avant un contenu vidéo et les autoplay qui démarrent automatiquement énervent et sont la plupart du temps fermées. Elles continuent malheureusement de hanter nos écrans et sont même de plus en plus nombreuses face à la baisse du taux de clic. Cependant elles ne sont plus très efficaces en l’état. Il y en a trop et elles ne sont pas ciblées.
Car le maître mot de la publicité devient en effet le ciblage. Les annonceurs ont dû réfléchir à des solutions plus pointues pour arriver à conserver une audience.
Plusieurs types de publicité ont ainsi vu le jour ces dernières années.
La « native advertising » ou « publicité native » est considérée comme la moins intrusive pour l’internaute
Elle est affichée au coeur du contenu éditorial du site que vous consultez. Facebook, Twitter les font apparaître dans le fil d’actualité. Elle se veut plus intelligente, plus proche de l’information que de la « réclame ». En se logeant au coeur des intérêts de lecture de l’internaute la marque créée un lien plus fort avec lui.
Ce type de publicité ne gène plus la navigation de l’internaute comme les pop-up par exemple. L’image de l’annonceur s’en voit améliorée. Les taux de clics des internautes seraient beaucoup plus important face à ce type de publicité à caractère informatif.
La publicité dite comportementale ou ciblée
Contrairement à la précédente elle est très intrusive. Elle repose sur un système de reconnaissance de vos goûts et choix via les cookies. L’usage de ces derniers a été largement détourné. Au départ c’était un système qui permettait aux utilisateurs de ne pas entrer leur login et mot de passe à chaque connexion à un site. Maintenant ils servent à obtenir des informations vous concernant à chacun de vos passages sur certains sites. Ils sont stockés sur votre ordinateur. Ils permettent d’établir votre profil de consommateur et de vous proposer des publicités personnalisées sur d’autres sites visités. Vous achetez un jouet pour votre enfant, vous risquez fort de voir apparaitre sur un autre site une annonce publicitaire vous proposant le même ou un autre du même style avec un lien vers le site commerçant. L’internaute n’est plus du tout incognito. Toutes ses recherches sont tracées et exploitées.
La publicité dans les moteurs de recherche
Si vous voulez acheter, rechercher des produits ou services, trouver des informations dans votre moteur de recherche (Google, Yahoo, Bing…), vous allez taper des mots-clés. Parmi la liste de réponses, vous trouverez des encarts publicitaires relatifs à votre recherche et/ou des liens payés par les marques pour vous incitez à aller sur leurs sites. Cette forme de publicité est dite du marketing par moteur de recherche (MMR) ou Search Engine Marketing (SEM). L’avantage pour l’annonceur est qu’il paye en fonction du nombre de clics de l’utilisateur et non pas pour l’affichage de publicités dont il ne connaît pas l’efficacité (comme pour les bannières). Ces publicités, quand elles sont sous forme de lien peuvent cependant nuire à la pertinence des résultats.
L’importance du développement de la publicité sur les mobiles
Par ailleurs, pour toucher un maximum de personnes, les annonceurs doivent désormais compter sur l’internet mobile pour leurs campagnes publicitaires et non plus seulement sur les ordinateurs. Le smartphone est devenu incontournable. Il représente une audience exceptionnelle car le temps passé en ligne par les utilisateurs est très important. Les annonceurs l’ont bien compris car la publicité Internet mobile est la catégorie de publicité en ligne qui a eu la plus forte croissance ces trois dernières années : + 58% des investissement publicitaires mobiles et + 69% pour la tablette au 1er semestre 2014 (1). Mais pour être entendus, ils ne peuvent plus se limiter à faire du copié-collé des annonces prévues pour les ordinateurs, ils doivent penser mobile à part entière. Les agences, les annonceurs manquent encore cruellement de créativité en la matière. Ils doivent proposer des publicités spécifiques, des dispositifs innovants.
Grâce à l’internet mobile plein de possibilités nouvelles s’ouvrent pourtant à eux. Notamment, les traces que vous laissez à chaque connexion via les cookies ou la géolocalisation de vos smartphones est une manne. Ils leur permettent de collecter des informations sur vos centres d’intérêt, vos comportements d’achat. La plupart des achats se faisant encore dans le monde réel, la publicité qui utilisera les informations fournies par la géolocalisation pourra toucher les utilisateurs avant et pendant l’acte d’achat. Mais ils reste aux marques de persuader les consommateurs de l’intérêt du service. La géolocalisation en magasin est encore très peu adoptée. Il y a encore souvent un réel décalage entre les pratiques des usagers et les choix des marketeurs. Les usagers utilisent principalement le SMS et très peu les technologies « à la mode » telles que les codes QR, ou les coupons mobiles par exemple. Si ce nouveau genre de publicités veut avoir un impact, les marketeurs doivent réfléchir à une pédagogie à destination des consommateurs. Quels sont les avantages pour eux, comment cela fonctionne-t-il etc.
L’achat publicitaire programmatique
On ne peut parler de la publicité sur le web sans parler des nouvelles pratiques d’achat des espaces publicitaires, les adtechs (adevertising technologies). Des algorithmes automatisent désormais la plupart des achat média sous forme d’enchères en temps réel (Real Time Bidding ou RTB). Avant cela les annonceurs étaient en contact direct avec les éditeurs. Là, un intermédiaire fait son apparition, les Ad-Exchange, ou place de marché (Facebook FBX, Orange Ad Market, Google Doubleclick…). En gros, des robots font désormais le travail d’achat, de retargeting (ciblage des internautes potentiellement intéressés) et d’affichage des publicités.
Ce système permet l’achat d’espaces publicitaires à prix cassés mais surtout de mieux cibler son audience. En effet, de multiples données sont désormais accessibles via la géolocalisation, les analyses comportementales…L’achat programmatique se définirait donc par l’achat d’espaces publicitaires au meilleur prix et avec la garantie d’être vu par les bonnes personnes, au bon moment.
Pour le moment, les publicités natives ne peuvent pas être achetées en programmatique, mais seulement le bon vieux display.
Ces dernières commencent d’ailleurs à vivre une seconde vie grâce à ce système d’achat. Celui-ci propose en effet aux annonceurs de placer des publicités sous forme de bannière mais au bon endroit, avec une audience plus ciblée.
L’écueil de ce système est qu’il est très complexe pour les annonceurs car il y a beaucoup d’intermédiaires entre eux et les éditeurs. Les algorithmes risquent de prendre un peu le dessus sur le créatif, l’émotion et l’annonceur n’y voit plus très clair sur la réelle performance de ses campagnes publicitaires tant la chaine de prestataire est longue.
Le ras-le-bol
Toute cette publicité multiforme envahissant tous les supports dérange une majorité des internautes. 78 % des Français s’en plaignent (2). Les bloqueurs de pub, dont le plus connu est Adblock plus, sont de plus en plus utilisés. Il existe également des logiciels qui empêchent les réseaux publicitaires de collecter vos informations, comme Ghostery (sur Firefox et Google Chrome).
L’usage de ces solutions est tellement en augmentation que les sites qui se financent essentiellement grâce à la pub commencent à être très inquiets. Une action en justice serait même en préparation. Certains sites commencent à interdire le contenu aux internautes équipés de ces bloqueurs de pub (l’Equipe.fr par exemple). D’autres proposent des solutions bloquant les bloqueurs…
Le principal ennemi des annonceurs le bloqueur Adblockplus propose lui-même de contourner son blocage en s’inscrivant à une white liste moyennant finance. Si l’annonceur propose des publicités dites « acceptables », moins intrusives (à savoir les liens sponsorisés par exemple) elles passeront à travers le filet.
Bref, la publicité sur le web semble donc connaître une période critique. L’audience n’a jamais été aussi grande mais également aussi peu réceptive.
Les nouveaux types de publicité adoptant des formats moins intrusifs sont une piste mais les internautes ne risquent-ils pas de se lasser également ? Et surtout ces publicités natives reviennent très chères à l’annonceur et ne peuvent donc pas remplacer tout le reste, notamment pour les petites entreprises qui ne peuvent pas se les payer.
Peut-être que plus de créativité et moins d’agressivité dans les publicités serait la solution? Un nouveau système économique qui permettrait de réduire leur nombre serait peut-être également envisageable? Moins de publicités mais plus attractives, de meilleure qualité ?
Vers une solution ?
En effet, la solution pourrait être de payer pour n’avoir plus ou moins de publicité. Mais les internautes seraient-ils prêts à le faire?
Seulement 13 % des Français accepterait de débourser à peu près 65 € par an, somme considérée comme le « prix juste » et qui est obtenue en « divisant le montant total des dépenses digitales en France en 2013 par le nombre d’internautes en France en 2013 » (2)
Plusieurs pistes récentes valables sont à explorer :
- Tout d’abord celle que propose Google depuis novembre 2014.
Les internautes américains peuvent adopter une solution qui leur permet de bloquer les publicités en échange de 1-3 dollars par mois pour les éditeurs partenaires. Ce système dénommé Contributor pourrait représenter une vraie révolution dans la rémunération du web. - L’idée serait aussi de réfléchir à une diversification des sources de revenus.
Pour cela nous pouvons prendre l’exemple du site web Presse citron qui depuis début février 2015 a complètement éliminé la publicité classique sur son site (bannières publicitaires). Le principe est de réduire le nombre des annonceurs partenaires et d’établir une relation suivie et de confiance avec eux. Chaque semaine l’un d’eux est mis à l’honneur de manière exclusive avec des articles, des découvertes, des coulisses etc…
Par ailleurs, Presse Citron propose une box payante remplie de cadeaux, d’avantages à ses fidèles lecteurs. - Avec l’arrivée de la publicité sur Instagram en mars 2015, nous avons l’illustration de ce que pourrait être des campagnes moins intrusives et plus qualitatives. Les annonceurs savent qu’ils s’adressent à une communauté de designers, photographes, graphistes etc… Les publicités doivent adopter la charte du site qui est le post de belles photos et ne comportant aucun logo ni texte. Elles sont intégrées dans le fil des membres avec la mention « sponsorisé ». On peut cependant la cacher facilement et/ou la commenter. Elles seront ciblées en fonction des centres d’intérêts des utilisateurs, des photos qu’ils aiment, de leurs publications etc.. Les annonceurs bénéficieront de plus de l’exclusivité d’utilisation du diaporama. Pour le moment Instagram privilégie la qualité sur la quantité. On peut cependant se demander si cela n’est que la première étape d’un processus de monétisation qui ira grandissant.
Le temps nous dira si cela fonctionne, en tous cas, il y a des pistes à creuser pour peut-être proposer aux internautes moins de publicité mais de meilleure qualité, plus créative, plus ludique et moins intrusive.
Sources:
(1) 12ème observatoire du SRI, 1er semestre 2014.
(2) d’après un sondage Opinion Way réalisé pour Mozoo, groupe de marketing mobile, le 9 et 10 octobre 2014 sur 1066 personnes âgées de 18 ans et plus.
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