Avec l’avènement de l’internet des objets, nos petites machines connectées nous regardent et nous évaluent. Si leur lucidité peut rendre bien des services, certains risquent de se noyer dans leur reflet numérique.
Jadis, les pèse-personne se contentaient de vous indiquer votre poids. Puis certains se sont mis à ajouter à cette information votre taux de graisse. Bientôt douées de mémoire, ces machines qui nous supportent ont ensuite révélé la variation de leur charge. Les derniers modèles se connectent à internet et vous offrent la possibilité de partager votre poids, de le publier, d’en découvrir les courbes de variations. La bonne vieille et désormais bien nommée balance n’est pas la seule à suivre cette évolution vers une sorte « d’intelligence communicante ». Les applications GPS nichées dans les Smartphones ont depuis longtemps dépassé la simple fonction de guidage : elles vous donnent aujourd’hui toutes statistiques possibles sur votre trajet et le dessinent sur une carte. Les sportifs mettent quant à eux leur cœur sur écoute et confient à des capteurs le soin d’évaluer leurs performances.
Ces nouvelles compétences des objets connectés sont très utiles dans le domaine médical : elles permettent un suivi plus fin de certains patients et des diagnostics plus pertinents. Mais le goût pour l’automesure se répand tant et si bien qu’il ouvre un nouveau champ sur le marché des applications grand public, l’emblème du genre étant le bracelet Flex de la société Fitbit, qui vous propose de mesurer toute votre activité physique, sommeil compris, et de partager ces informations sur le réseau. Cette tendance de fond est désignée sous les termes de « Quantified self », ou encore « Self Tracking ». Ses adeptes partagent leur poids ou leurs performances physiques comme d’autres des photos, au point que la CNIL (Commision Nationale de l’Informatique et des Libertés) a publié un communiqué (http://www.cnil.fr/linstitution/actualite/article/article/quantified-self-comment-mieux-se-connaitre-grace-a-ses-donnees/) pour mettre en garde les utilisateurs qui ont tendance à publier leur dossier médical.
Au-delà de l’aspect purement narcissique de cette habitude, leurs défenseurs trouvent dans ces nouveaux outils des leviers pour accomplir les changements qu’ils souhaitent dans leur vie. Il existe d’ailleurs des applications qui jouent le rôle de coach personnel. Le smartphone est devenu un outil indispensable aux adeptes du développement personnel. Pour d’autres difficile de ne pas voir là de nouvelles addictions potentielles, et un nouveau pas vers la dépendance aux machines.
Que les inquiets se rassurent pourtant : jusqu’à présent, les études montrent que l’on se lasse généralement assez vite de l’automesure et, comme pour un miroir, on apprécie d’autant plus l’image qui nous est révélée qu’elle nous semble valorisante. Si elle persiste à nous décevoir, nous avons tendance à lui clouer le bec.
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