Du code-barre à la puce, les objets jadis muets sont devenus très bavards, au point d’occuper de plus en plus de place sur internet. Le monde qu’ils nous dessinent est souvent plus sûr et confortable, parfois aussi plus inquiétant.
Il est bien loin, le temps où la communication était une activité réservée aux êtres humains, loin aussi l’époque où les seules machines qui pouvaient se parler entre elles étaient des ordinateurs : internet n’est plus aujourd’hui un espace dédié aux échanges et à la diffusion de données entre personnes. Il existe en effet un autre réseau des réseaux, dont l’importante, la taille et le nombre d’applications dans notre vie quotidienne augmentent de jour en jour : l’internet des objets.
Peu à peu, de très nombreux objets qui nous entourent et qui depuis toujours étaient parfaitement muets ont été dotés « d’organes » spécifiques grâce auxquels ils ont acquis la capacité de s’exprimer. Ces organes ont de multiples formes et utilisent autant de langages différents (radio, wifi, bluetooth,…). Dans leur expression la plus sommaire, ce sont des codes-barres ou leur version moderne, les QR codes. Mais c’est avec les puces de tous types, et notamment les minuscules puces RFID (de l’anglais Radio Frequency Identification), qu’ils sont véritablement devenus communicants. Ces puces sont souvent associées à des capteurs qui prélèvent des informations dans leur environnement (thermomètres, hygromètres…) et resteraient muets sans les récepteurs et logiciels capables de traduire leur langage : ce sont aussi bien les GPS de nos voitures que nos smartphones et leurs applications. Peu à peu, ces objets capables de s’exprimer envahissent notre vie quotidienne. Ils ont colonisé depuis longtemps les voitures modernes au point de remplacer la clef à molette par l’ordinateur, ils sont dans nos cartes de crédit, dans le moindre livre que nous achetons, et partout où il peut être utile d’identifier, de repérer, recueillir et communiquer des informations qui seront traitées ou stockées en vue d’utilisations futures. Ils sont l’arme absolue de la traçabilité ! Les animaux d’élevage, les manchots, les chats ou les cigognes ne sont pas épargnés. Notre corps lui-même commence à accueillir ces nouvelles sortes de puces pour stocker ou recueillir des données médicales, ou tout simplement pour accéder au carré VIP d’une boîte de nuit !
Ces objets connectés sont aujourd’hui deux fois plus nombreux que les êtres humains, un chiffre qui est appelé à doubler tous les cinq ans. Ce sont eux qui construisent ce que l’on appelle la « réalité augmentée », c’est-à-dire la diffusion en temps réel d’informations sur notre environnement via nos smartphones ou des lunettes spéciales : positions et expositions des musées les plus proches, données de circulation,… La perception des objets s’ajoute ainsi à la nôtre, s’y substitue parfois. Ils sont aussi très utilisés en domotique et dans de très nombreux systèmes antivol : un ordinateur portable volé puis revendu a ainsi récemment envoyé à son infortuné propriétaire des photos de ses nouveaux utilisateurs prises à leur insu !
Avec le perfectionnement des puces, leur miniaturisation et la multiplication des applications associées (pilotables sur ces écrans tactiles qui sont désormais des extensions incontournables de nos mains), les objets deviennent de plus en plus bavards. Ils pourraient même finir par se révéler indiscrets ! De nombreuses fictions ont d’ailleurs montré l’immense pouvoir que des mains malveillantes pourraient posséder en détournant et manipulant à leur profit l’ensemble des données de l’internet des objets. Des problèmes éthiques et de protection de la vie privée se posent déjà ici ou là, de nouveaux risques apparaissent… Le monde de demain sera-t-il peuplé d’objets voyants ou voyeurs ? Sera-t-il plus intelligible, ou plus inquiétant ?
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